: Simafar

Je vous en veux

Je vous en veux.

Directeurs d’universités ou de lycées, professeurs, je vous en veux.
Je vous en veux de ne pas voir la haine qui est en train de monter, de vous taire face à ce qui se passe, d’être indifférents. De ne plus voir certains élèves dans vos cours, sans vous en soucier, ou bien d’apercevoir des larmes, des crises d’angoisse, des visages ravagés, sans sourciller.
Je vous en veux de ne pas aborder l’antisémitisme, de ne pas aborder l’islamophobie, de fermer les yeux sur le racisme, en croyant que l’ignorer c’est l’empêcher d’exister.
Vous êtes trop âgés, vous avez trop de responsabilités, trop d’expérience, trop d’intelligence, pour avoir le droit à la lâcheté.

Étudiants, je vous en veux.

Je vous en veux de me haïr pour une nationalité et une religion que je n’ai pas choisies. De vous permettre de me détruire parce qu’une bonne cause vous sert de prétexte ; parce que vous avez l’impression qu’en me brisant, vous brisez un gouvernement. La haine des Juifs et des civils israéliens n’est pas du militantisme. Faire preuve d’humanité n’est pas contraire à vos convictions. Vous condamnez le racisme, mais vous me discriminez. Vous militez pour les minorités, mais vous considérez que la mienne est trop privilégiée. Vous lisez « Interdit aux Juifs », vous rejetez la faute sur « un gouvernement de nazis ».
Vous vous dites tolérants, vous n’arrivez pas à me tolérer.  Vous n’êtes pas pardonnables.

Autres étudiants, ceux qui ne disent rien de mal, mais qui ne disent rien de bien non plus, ceux qui ignorent et qui se taisent ; je vous en veux aussi.

Je vous en veux d’être silencieux, de ne plus me regarder, de tourner la tête à mon passage, quand hier encore, vous m’invitiez chez vous.
Vous avez peur des mots, peur des regards, peur de vos camarades… Vous êtes pris au dépourvu, vous ne savez pas réagir, on ne vous l’a pas appris, vous êtes dans une position inconfortable…
Mais vous avez passé l’âge d’être indifférents. Vous avez une responsabilité. Vous ne pouvez pas vous taire quand cela se passe sous votre nez.

Communauté juive, à vous aussi, je vous en veux.

Je vous en veux de manière égoïste, de manière puérile, je vous en veux comme une jeune femme de vingt-et-un ans qui est en colère, peinée et qui ne comprend pas…
Je vous en veux de vous cacher. Je vous en veux de retirer mézouzot et kippot, de moins fréquenter les synagogues, de ne plus envoyer vos enfants à l’école, de ne plus aller à l’université, de cacher votre religion, vos origines, et même votre souffrance.
Je vous en veux de disparaître parce que d’autres souhaitent que vous disparaissiez. Nous avons le droit d’exister…

Je m’en veux aussi de vous juger.

Enfin, population française toute entière, je vous en veux de vous taire.
Ne soyez pas aveugles à ce qui est en train de se passer. C’est grave, ce qui est en train de se passer.
Nous avons besoin de soutien.

Je vous remercie.

Lisa Hazan,

Une étudiante juive parmi tant d’autres.

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